La
Fête des pères 2015
À
la mémoire de mon père,
Jean
G. Nadon
4
juillet 1923-
21
février 2001
Jean Gabriel Nadon, John, Mon Oncle Johnny,
Dad, Pa.
Je n'ai pas beaucoup connu mon père pendant mon enfance. Il
travaillait de longues heures à partir du mois d'avril jusqu'au mois d'octobre
à Lachute. Nous allions passer les étés avec lui. Il m'amenait dans les grandes
cuisines du club de golf de Lachute pour que le pâtissier me gâte avec toutes
sortes de créations sucrées.
Quand mon père a reçu l'invitation pour travailler pour le
Gouverneur Général c'est ma mère qui l'a encouragé d'accepter ce poste
prestigieux. Alors là, il travaillait de longues heures à longueur d'année à
Ottawa. Ma mère et moi allions le voir lorsqu'il ne pouvait pas descendre ici. J'étais
très jeune et ça m'impressionnait de voir mon père vêtu dans un genre de tuxedo
avec une grande queue ressemblant à un chef d'orchestre. Mon père l'appelait
son "monkey suit". Il était beau dans son monkey suit.
Environ toutes les 2 semaines, mon père descendait à Montebello
pour une fin de semaine de congé. Nous nous assoyions au souper avec des
chandelles et une bouteille de vin. En ce temps-là, mon père coupait mon vin
avec de l'eau. Il avait toujours de bonnes histoires à nous raconter. Au lieu
de contes de fées, mon père remplissait ma tête avec des anecdotes de la vie de
Rideau Hall remplies de personnages comme des rois, des reines, des premiers
ministres et des présidents de pays lointains. Il était bon raconteur.
Il nous rapportait des cadeaux et des souvenirs exotiques. À un
party surprise pour ma fête, il nous a servi un délice d'un pays africain: des
chenilles fumées. Il a fait semblant d'en déguster pour convaincre mes amis et
moi d'en manger.
Mon père a eu la chance de voyager. Il a partagé une de ses aventures
avec moi l'été de mes 16 ans. Il m'a emmenée pour mon premier vol à bord d'un
Boeing 707, mais pas n'importe quel Boeing. C'était l'avion de la reine
d'Angleterre. Quel baptême de l'air! Moi, j'espérais rencontrer le beau Prince Andrew,
j'avais même porté une jupe, mais il avait pris un autre vol. Par contre, j'ai
fait la connaissance d'un autre prince. La relation avec mon père dont je
jouissais les dernières années de sa vie a pris naissance pendant ce voyage. Nous
sommes revenus de Vancouver par le train. Quatre jours toute seule à traverser
le Canada avec mon père. C'était le début de notre complicité.
Mon père était un homme sage. Quelques semaines après avoir quitté
le village pour poursuivre mes études à Montréal, j'ai téléphoné à mon père
pour lui dire que je voulais tout lâcher. Papa pouvait aussi être économe avec
ses mots: "Je comprends que tu trouves ça difficile, mais reste à l'école,
me dit-il doucement, on en reparlera à Noël". Il savait bien ou bien il
espérait que je plonge dans mes études et ma nouvelle vie. Il a eu raison. Rendu
à Noël tout allait bien et je voulais continuer mes études. Deux ans plus tard,
rendue à l'université d'Ottawa, demeurant à quelques rues de mon père, je lui
ai téléphoné pour lui dire que j'étais découragée et que je voulais quitter les
études. Encore une fois, mon père m'a répondu: "Reste à l'école, on
en reparlera à Noël".
Papa savait comment j'allais juste à me regarder ou à entendre ma
voix. Il me disait: "Viens faire un tour au bureau." Il
m'assoyait dans sa chaise. Il revenait avec des restants succulents d'un repas
gastronomique et il me racontait des histoires. Il a toujours gardé cette douce
sensibilité.
Papa a toujours continué de nous divertir avec ses histoires. Deux
semaines avant son décès à l'heure du
souper, il nous racontait les différentes manières qu'il a tenté de s'esquiver
de son service militaire pendant la guerre. Ses copains et lui ont même
ingurgité des négatifs de photos en croyant que ça révélerait des taches sur
leurs poumons. Malgré tous leurs efforts, ils ont servi leur pays.
La veille de notre voyage en Espagne pendant lequel il est décédé,
je lui ai demandé: "Comment as-tu
fait pour ne pas t'inquiéter pendant les 3 ans que j'étais en
Europe?" " Qui te dit que je ne me suis pas inquiété? Il
fallait que je l'accepte", m'a-t-il répondu en regardant par la fenêtre du
salon.
Je suis reconnaissante que la vie m’ait prêté deux parents qui ont
donné à Vincent et à moi de l'amour, une joie de vivre, un sens de l'humour et
une appréciation pour tout ce qui est beau et bon.
Ce qui était le plus important pour mon père était de savoir que
sa famille était en sécurité et heureuse. Je me sens bénie d'avoir profité des
dernières années avec mon père. Que de matins nous avons admiré les oiseaux
dans nos mangeoires, les chevreuils dans les champs et la rosée sur nos fleurs.
Que de journées nous avons passées à dévorer des livres de recettes. Il
n'est plus là. J’ai appris à accepter le départ prématuré de mes parents. Je sais
dans mon coeur qu’ils sont en sécurité et heureux.
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